Cet article retrace à grands traits l’évolution des connaissances scientifiques sur les acides,
les bases, les cations et les anions, depuis la première tentative d’explication de la nature des
acides et des bases (1675) jusqu’à leurs ultimes définitions (1925). Parallèlement, l’évolution des
connaissances sur les cations échangeables et la capacité d’échange des sols est racontée
depuis 1840 jusqu’à nos jours avec, en contrepoint, la représentation qu’ont les agronomes
et les pédologues, principalement français, de ces différents concepts. Enfin, l’histoire de
l’intérêt du chaulage, pratiqué depuis l’antiquité romaine, est racontée telle que l’apprécient les
agronomes depuis le début du XVIIe siècle.
Ces histoires parallèles mettent en lumière le décalage important entre les acquis scientifiques
et les écrits de nombreux agronomes et pédologues de 1925 à 2000: les cations sont dits
« basiques », la capacité d’échange cationique est supposée « constante » et le pH du sol est
censé dépendre du « taux de saturation » de la capacité d’échange par les cations basiques,
ces derniers chassant les H+ « échangeables ». En France, à partir de 1995, des agronomes
ont mené de nombreuses actions pour corriger ces idées fausses présentes même chez les
chercheurs en Science du sol.
Cette correction de la représentation des cations échangeables et de la capacité d’échange a
des conséquences de plusieurs types. Tout d’abord, le pH du sol apparaît contrôlé par l’état
des sites à charges variables sur une large gamme de pH. Ensuite, l’agronome peut enfin
expliquer les effets du chaulage, connus depuis si longtemps: la hausse du pH et celle de la
CEC effective sont étroitement corrélées. Et c’est l’augmentation de la CEC effective, pas celle
du pH, qui explique l’amélioration de l’affinité pour l’eau et de la stabilité structurale du sol. Enfin, le mécanisme à la base de cette amélioration est dû à la nature polaire des molécules d’eau et aux forces de Coulomb entre molécules
de charges opposées.
Mots-clés
Histoire, agronome, chimie, pH du sol, cation échangeable, capacité d’échange, chaulage, affinité pour l’eau, stabilité structurale.
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