Depuis la publication du rapport du Millenium Ecosystem Assessment (2005) on observe une utilisation croissante de la notion de service écosystémique (SE) par les chercheurs des sciences de la nature. Or cette notion qui est généralement associée à une évaluation économique des services rendus à la nature par l’homme renouvelle les relations entre science et politique. Elle réinterroge la nature des connaissances scientifiques celles-ci devant contribuer plus directement à la définition des politiques de protection de l’environnement. Dans cet article nous nous sommes plus particulièrement intéressés aux sols agricoles pour étudier en quoi l’approche par service écosystémique conduit à modifier la production scientifique sur cet objet. Pour ce faire nous avons réalisé une étude bibliographique approfondie à l’aide du logiciel de lexicométrie Iramuteq. Nous avons analysé plusieurs corpus d’articles scientifiques de sciences du sol publiés entre 1992 et 2012 et sélectionnés sous la base de données Web of Science puis nous avons comparé les résultats de ces analyses. Nous avons ainsi mis en évidence une évolution forte des thématiques et des relations entre disciplines au sein des sciences du sol depuis les années 1990 avec principalement une montée des approches écologiques dans l’étude des sols agricoles. Nous avons également montré que les articles qui font référence à la notion de SE présentent des spécificités : (i) la modélisation n’apparaît pas comme une méthode centrale d’étude (ii) les pratiques agricoles sont appréhendées sous l’angle de la préservation des sols plutôt que de leur exploitation à des fins de production (iii) les approches biologiques et écologiques sont diversifiées et centrées davantage sur les communautés et les activités des organismes vivants. Par ailleurs dans la littérature scientifique analysée l’étude de processus écologiques et biogéochimiques donnés qui prennent place dans les sols agricoles est privilégiée mais elle n’est pas reliée de manière précise aux services qu’ils sont susceptibles de fournir. Par conséquent pour l’heure l’utilisation par les chercheurs en sciences du sol de la notion de SE n’entraîne pas de changements majeurs concernant la nature des connaissances qu’ils produisent sur les sols utilisés par l’agriculture.
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