La mise en dépôt de sédiments de curage est une pratique courante dans certain bassin versant français. Jusqu’à la fin des années 80 celle-ci se faisait sans précaution particulière et des matériaux parfois contaminés en divers polluants organiques et inorganiques ont été déposés sur des sols perméables. L’un de ces sites est à l’heure actuelle particulièrement préoccupant en raison d’un niveau contamination exceptionnel en divers éléments inorganiques (de l’ordre du % en masse en Pb et Zn). L’altération météorique de ce sédiment de curage depuis sa mise en dépôt en 1976 conduit à la formation d’un anthroposol au fonctionnement pédologique mal connu. Une première phase de caractérisation à l’échelle du profil (Bataillard et al. 2008) avait mis en évidence l’oxydation des sulfures comme le mécanismes prépondérant à l’origine de la transformation géochimique du matériau. Cette altération induit une forte mobilité du fer qui a également une incidence forte sur le devenir de la plupart des éléments potentiellement toxiques (EPT) au cours de la pédogenèse précoce. Cet article présente les résultats de caractérisation d’échantillons choisis le long du profil par des techniques spectroscopiques non destructives permettant notamment de discuter des phases néoformées capables de fixer les EPT. La complémentarité des techniques utilisées (microscopie électroniques équipée d’une sonde d’analyse à énergie dispersive micro fluorescence X sur rayonnement synchrotron émission de photons X induite par des particules chargées et analyse par réactions nucléaires) en mettant en évidence des associations majoritaires à l’échelle d’un micron a confirmé que les néoformations d’hydroxydes de fer sont des pièges pour les éléments Zn Pb Se et As. Ces associations apparaissent localement dans le solum à la faveur d’une augmentation du potentiel redox. Dans le cas de Pb cette association apparaît quantitativement secondaire par rapport aux nombreux grains de carbonates de Pb observés dans les échantillons. De plus dans la partie très superficielle de l’horizon probablement la plus altérée apparaît une association Pb Se As et P qui pourrait correspondre à un mélange de phosphates arséniate et sélénate de Pb. Les observations ont également mis en évidence qu’une partie du stock de Zn et Pb se trouve dans des particules vitreuses peu altérées héritées du procédé industriel de l’usine responsable de la contamination. Les résultats obtenus montrent l’absence de phase susceptible de piéger efficacement Cd au cours de la transformation géochimique du matériel mis en dépôt. Ce résultat est cohérent avec un départ de l’ordre de 60% de cet élément initialement présent dans le sédiment avant son altération. La solubilité de certaines phases secondaires identifiées comme le carbonate de plomb et la stabilité des associations de surface dépendent des conditions physico-chimiques du milieu (force ionique pH Eh…). Ces néoformations constituent donc des pièges peu efficaces des éléments-traces et doivent être considérées comme des sources potentielles de contaminants. Une synthèse sur l’apport des techniques spectroscopiques pour l’étude de la spéciation des ETM dans les sols est finalement proposée à l’issue de ce travail.
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